Regard sur des visages

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Masques Jean Carriès, grès émaillé.

Ma fille étant artiste céramiste (voir lien en bas de l’article), c’est un art auquel je suis devenu naturellement plus sensible. L’art terrien par excellence : faire naitre la beauté, l’émotion ou la réflexion, d’une simple poignée de terre. Art des origines aussi, peut être le  plus ancien : plonger ses mains dans la glaise, l’argile, les pétrir, les polir, les caresser, pour les façonner, les sculpter, y ajouter toutes sortes de pigments colorés ou non, les porter parfois à incandescence, pour enfin les transmuer en faïence, en grès, en céramique, en objets utiles ou ornementaux, symboliques ou figuratifs, sacrés ou païens, fragiles et impérissables, immémoriaux.

La Maison Rouge, boulevard de la Bastille, rend actuellement hommage à cette discipline de très belle manière sous ce titre « Céramix » du 9 Mars au 5 juin 2016.

Ce lieu chaleureux, atypique de par la structure de cet ancien bâtiment, l’agencement de ses salles sans ostentation, reliées entre elles en labyrinthe, autour d’une cour centrale couverte par une véranda, expose des céramiques de tous pays et de tous styles couvrant une période allant de Rodin à Schütte, soit du Dix neuvième siècle à nos jours.

Comme il y a pléthores d’œuvres remarquables, afin de ne pas vous submerger d’images, je me suis limité à celles qui mettent en scène des visages sous formes de masques, de bustes, de portraits en pieds…  Non pas qu’il s’agisse nécessairement des œuvres les plus belles ou les plus représentatives, mais pour mettre en lumière ce paradoxe : Représenter un visage, ses expressions, me semble être à la fois le plus grand défi pour un artiste comme le plus enfantin. Donnez un boudin de pâte à modeler à un enfant et il en fera aussitôt un bonhomme avec une grosse tête et un visage. Les premières têtes de poupées étaient pour la plupart en terre cuite puis en porcelaine.

Cliquez sur l’une des images pour agrandir et faire défiler. Les légendes sous chacune d’elle indiquent le nom de l’artiste, de l’œuvre, et sa date.

Tout art recèle une part de volupté. Cependant, celui-ci trouve sa source même dans celle de la matière, puise son inspiration, sa fascination, dans ce plaisir manuel, primitif, sensuel, de modeler l’imaginaire pour le matérialiser. Le seul qui mêle également les quatre éléments, l’eau, la terre, le feu et l’air.

Elsa Sahal
Elsa Sahal, céramiste, dans son studio, (photo issue du catalogue) en train de réaliser la fontaine que je montre en GIF dans la dernière aventure de Sizif, exposée au musée de la Maison Rouge. Cliquez sur l’image pour voir cette fontaine en action… !

Liens vers quelques œuvres céramiques de ma fille :

Délestages

Musée personnel

Maintenant, je laisse le soin à ‘Vy de compléter ce tableau exhaustif de cette exposition qui  vaut le détour, avec son exigence, son œil et sa sensibilité sur l’article de son blog « les oiseaux dans le bocal« … Beaucoup d’autre œuvres étonnantes n’y attendent que votre regard…

Capture d’écran 2016-01-02 à 21.10.07

Publié par

Francis Palluau

Scénariste, auteur, réalisateur, professeur, consultant touriste sédentaire.

26 réflexions au sujet de “Regard sur des visages”

  1. Merci à vous deux pour ces images impressionnantes pour beaucoup d’entre elles,
    et j’aime particulièrement l’élégance des céramiques de ta fille Francis.
    Bravo à Loisobleu pour son magnifique poème.

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  2. Super. J’ai d’abord lu vos commentaires sur cette très belle expo et les visages. Ensuite, je suis allée me balader dans votre autre texte et les céramiques magnifiques (j’insiste) de votre fille. Un régal. Puis je suis allée faire un tour chez ‘Vy et j’ai découvert aussi le poème de Nyala l’Oiseau bleu (qui figure aussi ici), ensuite j’ai clôturé mes visites par le commentaire. Bref, une belle promenade du matin, instructive, passionnante, intéressante, captivante. Je vous en remets un p’tit peu ?

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  3. une belle complémentarité dans vos articles à ‘vy et toi; quel régal pour moi!!!!
    et je vois que les *visages* nous interpellent beaucoup ces temps-ci 😉
    et puis bravo à ta fille pour ses créations dont je me souviens bien! ( bon, elle a de qui tenir avec un papa aussi prolixe 😉 )

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  4. L’ARGILE

    Ils disaient :  » l’argela  »

    Vous disiez :  » la arcilla  »

    Nous étions frères dans la fange.

    L’argile ouvrait très largement

    les yeux de l’oc et de l’Espagne.

    Vous disiez :  » la arcilla « ,

    de Madrid à Séville;

    et nous  » l’argela  »

    de Clermont à la mer

    des Alpes aux Pyrénées.

    Nous la contemplions dans sa mollesse

    et dans sa dureté,

    l’argile des temps obscurs

    semblable à elle comme au temps

    où Dieu seul

    lui insufflait la vie.

    Et nous la pétrissions

    et nous la caressions

    du doigt

    et le soleil de chaque pays

    égal pour tous

    la brûlait.

    Et la séchait,

    et la durcissait.

    Il en faisait le fer

    d’un pot

    et l’ampleur

    d’une jarre.

    Le ventre plein

    de la femme enceinte

    le blé mûr

    pour passer l’hiver,

    et l’eau fraîche

    quand tout est sec,

    et l’huile verte

    dans les ténèbres du temps.

    Tu disais :  » la arcilla « ,

    ô toi Neruda,

    dont la face

    était d’argile pleine

    et bien pétrie.

    Qui levais sur nous

    ces yeux

    qui avaient vu

    le chemin des Incas

    et la neige savoureuse

    et l’air irrespirable

    des Andes.

    Joues d’argile

    front de pierre

    et tes yeux de songe

    qui croisèrent les yeux ensevelis

    de Lorca.

     » La arcilla  » le couvre

     » La arcilla  » remplit sa bouche

    « La arcilla  » ferma ses yeux

    Il s’est enfoncé doucement

    dans  » la arcilla « .

     » La arcilla l’a dévoré

    lentement,

    et nul ne sait, dans la honte,

    où l’on a jeté son corps

    comme celui d’un chien mort.

    L’olivier, l’olivier, avec ses doigts gris

    dit oui, dit non, au fil du vent

    à celui qui vient questionner l’argile

    et d’un olivier à l’autre on ne sait pas

    où il s’endormit pour toujours

    Max Rouquette

    .
    Sourire au masque libéré de la souffrance temporelle, ne sentant plus par le regard, que l’éternelle chaleur des doigts qui l’ont pétri, remonter un Autre sel à ses yeux.

    Magnifique préemption du Souffle

    Mis en double, à ‘vy et à toi Francis, très chaleureusement.
    Alain

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  5. J’aime ton article, tu sais y montrer les visages, ce qui, peut-être était le plus difficile, je n’en ai d’ailleurs pas beaucoup photographiés.
    Mais tu diras à ta fille, que si ces oeuvres avaient été exposées à la maison rouge, elles auraient été parmi celles que j’ai préférées.

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