Coup de blues. Yannick Bellon s’est éteinte dimanche. Par l’intermédiaire d’un ami commun, j’ai eu le privilège de la rencontrer en collaborant sur son dernier projet de long métrage, en 2010. Elle avait alors plus de quatre vingt cinq ans et des projets pour au moins autant. Je garderai d’elle, au delà de ses films précurseurs, audacieux, le souvenir d’une énergie stupéfiante, d’un esprit affuté qui ne lâchait rien, animé d’une grande curiosité et d’une passion intacte. Toute ma gratitude pour ces après midi passées à construire et déconstruire son scénario, « un charme slave », ses personnages, avec une obstination jubilatoire, dans son bureau, une galerie située dans un passage parisien, lieu hanté par sa mère, grand reporter photographe, et sa sœur Loleh, actrice et dramaturge reconnue , un lieu à son image finalement, inclassable.
J’ai même dormi une fois dans cette galerie, par curiosité, Yannick m’ayant passé les clefs . A l’étage, il y avait une petite chambre avec une lucarne donnant sur le passage fermé et désert, couvert d’une verrière. Grâce à elle, j’ai eu l’impression de voir passer les ombres de Verlaine, de Rimbaud et de Baudelaire cette nuit là.
Coup de blues aussi parce que sa disparition n’a pas provoqué le moindre remou dans le landerneau médiatique et culturel. Comment se fait il que les féministes, et le milieu du cinéma, ne lui aient pas rendu un hommage à la hauteur de ce qu’elle a représenté ?
Car Yannick Bellon fut une pionnière, l’une des très rares scénaristes, réalisatrices, productrices de long métrages comme de documentaires, à avoir touché un vaste public sur des sujets brulants et dérangeants, d’autant plus dans les années soixante-dix, comme le cancer du sein et le viol, avec des héroïnes, le plus souvent des femmes en reconstruction, qui se définissaient face au malheur, à la perte, à la violence des hommes.
Pourquoi cette indifférence, au moins apparente, à son décès ? Peut être parce qu’elle était avant tout une franc-tireuse, sans concession, inclassable encore une fois ?
Pour en savoir plus sur elle :
Merci Francis d’avoir porté ce travail et cette œuvre à ma connaissance.
Et le plaisir de vous lire.
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Ce petit mot me fait plaisir, Henriette.
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Suis contente de te lire même en de tristes circonstances !
Reviens-nous de temps en temps ;o)
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Merci, je repasserai sans doute.
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C’est vrai que vos chroniques nous manquent car vous êtes un humaniste au sens noble du terme. Je ne connaissais pas du tout cette réalisatrice mais franchement, on peut alors se poser cette légitime question : les journalistes font-ils encore leur boulot ? Car la curiosité mais aussi la culture générale (tout autant que l’impartialité qui n’est plus en ce monde-là, un comble, en tout cas chez nous) sont devenues denrées rares. Ont-ils parlé de la mort de Louise Bourgeois, une grande dame de l’art contemporain actuel ? Que nenni ! Elle était à l’art, ce que Charles Aznavour était à la chanson pourtant ! Mais que diable vont-il faire dans cette galère ? Oui, tous ces journalistes qui font un métier tellement aveuglant, dans les journaux, à la télé, à la radio, qu’ils en oublient de regarder derrière les spots qui les aveuglent !
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Hélas, ce n’est pas l’information qui prime, mais le buzz… il faut parler ce dont tout le monde parle pour l’amplifier. Tout le monde a parlé du décès d’Agnès Varda parce qu’elle a toujours été en odeur de sainteté dans le microcosme parisien (je ne dis pas que c’était à tort) mais pour d’autres, un peu oublié, il faudrait encore être curieux, vraiment curieux…
Merci, Anne !
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Bonsoir Francis! C’est incroyable, hier je me disais « Quand même, ça me manque ces rubriques de Francis… »
Je n’ai rien entendu concernant la mort de Yannick Bellon…! Oui, pourquoi?
J’avais vu « L’amour violé » à sa sortie et en avais été marquée. J’adorais Nathalie Nell, Christine Boisson, Dominique Laffin, Christine Pascal (dont j’ai vu « Le petit prince » il y a peu…) Elles étaient quelques unes de cette trempe à l’époque à essayer de faire bouger les choses.
A bientôt j’espère!
Marité
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Bonjour Marité, quelle mémoire. Je me souviens également à présent des ces femmes actrices réalisatrices.
Amitié,
Francis
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Contente de te lire, Francis, même si c’est triste….
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Merci Malyloup
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mon souvenir le plus marquant quand je pense à Yannick, c’est le film ‘la femme de Jean’…..et je peux dire qu’avec Coline Serreau , ce sont des femmes qui ont façonné ma vie (bien plus que ma propre mère)
sans ton billet, je n’aurais pas su qu’elle n’était plus de ce monde mais pour moi, grâce à ses films, elle est bel et bien présente à jamais…..et je pense à elle avec reconnaissance et tendresse
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Bel hommage, malyloup. Elle aurait apprécié, j’en suis certain. C’était, je l’ai ressenti ainsi en discutant avec elle, une féministe positive, c’est à dire qui ne se positionnait pas contre les hommes en général, mais pour les femmes.
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oui c’est tout à fait *ça*, Francis: pas contre les hommes mais pour les femmes! et mon amour pour les hommes ET les femmes va bien dans ce sens 🙂
les femmes de ma familles étaient plutôt en guerre avec les hommes et ça ne m’allait pas du tout car je ne vois de salut que dans la paix et l’égalité des sexes
c’est ainsi que l’oeuvre de Yannick a contribué à forger mes en-vies 😉
moi ça me fait plaisir que tu l’aies connue ‘en vrai’ et appréciée
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Merci, Francis.
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Ça me fait plaisir de te voir passer.
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C’est réciproque, Francis.
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